
Les fascias ont fait leur entrée dans la médecine occidentale.
Cela paraît à peine incroyable mais cet organe, d’environ 20 kg en moyenne, chez les adultes humains, a été ignoré jusqu’au 21 siècle ! (1)
La médecine chinoise connaît leur puissance depuis plusieurs millénaires grâce à l’acupuncture.
Et désormais, l’action “mécanique” de cette approche thérapeutique a été largement démontrée même si les chinois n’avaient jamais pu décrire dans le détail les effets de leurs aiguilles sur l’anatomie humaine. (1)
Ils se sont contentés de noter les bienfaits de l’acupuncture sur la santé. Et cela leur a suffi pendant plus de 5000 ans !
La chaîne de télévision Arte a consacré un documentaire passionnant sur la découverte récente des fascias et les chercheurs qui ont permis de comprendre comment ils fonctionnent.
Vous retrouverez ici ce documentaire. (2)
Je vous en redonne les grandes lignes si vous n’avez pas le temps de le visionner.
Que sont les fascias ?
Il s’agit d’un tissu conjonctif humain incolore ou blanchâtre, élastique et un peu visqueux qui entoure les muscles, les tendons et les os.
Les fascias tapissent tout le corps y compris le cerveau où, par exemple, ils entourent les méninges qui sont eux-mêmes des membranes qui protègent le système nerveux central.
Les cellules qui composent les fascias sont appelées des fibroblastes.
Elles ont diverses fonctions qui varient selon le type de fibroblastes.
Par exemple, elles peuvent favoriser la production (3,4):
-
- d’acide hyaluronique qui facilite leur fonctionnement ainsi que celui des muscles et des articulations ;
- ou du collagène qui sert à constituer les os et les cartilages et les fascias eux-mêmes.
Les fascias peuvent être superficiels lorsqu’ils sont sous la peau ou plus profonds lorsqu’ils entourent les organes ou les fibres musculaires. (2)
Ils ont un rôle déterminant dans de nombreux systèmes du corps humain :
-
- le fonctionnement des neurones ;
- la perception du corps ;
- la transmission de la force ;
- la tension « physique » dans le corps et en particulier les membres ;
- la réparation des tissus.
Les chirurgiens les avaient pourtant bien observés…
Le premier médecin à avoir décrit les fascias est français.
Il s’agit de Xavier Bichat qui les mentionne dans une étude anatomique. Il parle alors de « membranes ». (5)
D’autres médecins, souvent des chirurgiens, décrivent les fascias mais la médecine occidentale ne s’y est réellement intéressée que récemment.
En France, ils ont été décrits en détail par le Dr Jean-Claude Guimbertaud, chirurgien à l’Institut Aquitain de la main de Bordeaux. (2,6)
Ce médecin a placé une caméra d’une taille infime sous la peau de ses patients.
Il a ainsi obtenu des images de fascias vivants qui confirment leur présence et leur aspect tel que décrits par les cliniciens : blanchâtres, fibreux, souples et fins.
Enquête familiale en Italie
En Italie, une famille de scientifiques s’est consacrée corps et âme dans l’étude des fascias.
Le reportage d’Arte propose une interview de Carla Stecco, la femme qui a réalisé le premier Atlas des fascias humains.
Aucun scientifique au monde n’a poussé l’observation des fascias aussi loin qu’elle. (2,3)
Elle explique que son père était tellement passionné par les fascias qu’il en parlait tout le temps.
Quand elle est devenue chercheuse à son tour, elle a souhaité poursuivre ses recherches même si, au départ, elle n’était guère convaincue par leur rôle.
Mais après de nombreuses dissections et de longues années à observer les fascias, Carla Stecco s’est ralliée à l’avis paternel : pour elle aussi, les fascias jouent un rôle essentiel dans la santé humaine.
Elle précise que les fascias forment un système qui est aussi important pour la santé que peuvent l’être les muscles ou les nerfs.
Elle explique qu’ils sont composés d’eau, de protéoglycanes – qui sont des protéines – et de tissus riches en collagènes et en acide hyaluronique.
Enfin, elle confirme ce que pensent d’autres experts comme Thomas Myers, thérapeute manuel qui leur a consacré un livre (Anatomy trains) : les fascias forment un tout continu. (7)
Quel changement de perspective ! (2)
Prendre soin des fascias : une des clefs pour soigner le mal de dos
L’une des caractéristiques des fascias est qu’ils sont « mobiles » : ils glissent sur les organes et également entre eux..
Cette capacité est signe de bonne santé.
Elle est maintenue grâce à l’activité physique qui permet de réguler la production de collagène.
Ainsi lorsqu’un membre du corps est plâtré et immobilisé durant plusieurs semaines, les fibres qui constituent les fascias prolifèrent.
Si l’échographie montre des fibres emmêlées, déstructurées et épaissies : rien ne va plus.
Pour les experts des fascias, les douleurs du bas du dos, qui sont si fréquentes, sont d’abord liées à un manque d’activité physique.
En effet les fascias thoraco-lombaire forment une zone critique, fragile.
Et c’est là que la tension s’accumule.
Le stress chronique, aurait par ailleurs, une influence sur l’activité des fascias qu’il inhiberait.
Le mal de dos serait ainsi lié aux fascias trop tendus, bloqués ou freinés par le stress chronique. (2)
Fascias, acupuncture et traitement de douleur
Depuis longtemps certains thérapeutes manuels pensent qu’il existe des lignes de fascias. A tel point qu’il existe des fasciathérapeutes, une pratique proche de l’ostéopathie.
Ils ont remarqué que lorsque l’on travaille sur les jambes on peut agir sur le dos et même sur le cou.
L’idée de ces lignes, un peu conceptuelles, rappelle la théorie des méridiens qui traversent le corps en médecine chinoise. (8)
Y a t’il un lien entre les deux ?
En médecine chinoise, les méridiens véhiculent une énergie appelée Qi. (8)
La science occidentale moderne a démontré que l’action des fascias est en réalité mécanique : c’est un tissu élastique sur lequel il est possible de tirer.
Certains thérapeutes pensent que l’énergie des méridiens identifiée par les Chinois depuis des siècles serait bien liée à l’action des fascias.
Pour l’instant, cette hypothèse ne semble pas très documentée.
En revanche, des chercheurs ont démontré que les fascias réagissent aux aiguilles d’acupuncture. (2)
Les fibroblastes situés au lieu de la piqûre réagissent ainsi que ceux se trouvent un peu plus loin à quelques centimètres.
Les experts pensent que les fascias jouent un rôle spécifique dans la perception de la douleur.
Ce rôle pourrait être plus important que celui des muscles.
En effet, les fascias sont directement liés aux terminaisons nerveuses.
Dès qu’ils sont touchés votre corps vous en avertit immédiatement.
L’observation du comportement des fascias lors des séances d’acupuncture expliquerait pourquoi cette thérapie peut agir sur la douleur ainsi que le stress et le bien-être.
Toutes ces recherches sur les fascias sont porteuses d’espoir pour les patients.
Elles pourraient se traduire par une meilleure prise en charge du mal de dos, notamment grâce aux thérapies corporelles ou à l’acupuncture.
Certains chercheurs espèrent aussi qu’une meilleure compréhension des fascias pourrait améliorer la prise en charge du cancer. (2)
Mais c’est une autre histoire.
Références
-
- https://www.ecole-du-dragon-de-jade.fr/actualites/articles/fascia-et-medecine-chinoise-decouvrez-notre-approche-unique-en-france
- https://www.youtube.com/watch?v=2lKDcNvQ9FQ
- https://fasciafrance.fr/wp-content/uploads/2019/05/Composante-hormamonale-du-fascia_compressed.pdf
- https://www.alternativesante.fr/fascias/mobilite-articulaire-douleurs-musculaires-infections-bacteriennes-le-role-de-mieux-en-mieux-reconnu-de-nos-fascias
- https://www.france-memoire.fr/
- ://www.sfrm-gemmsor.fr/file/medtool/webmedtool/gemmtool01/botm0190/pdf00001.p
- https://www.elsevier-masson.fr/anatomy-trains-9782294775031.html
- https://www.7sources.ch/meridiens-et-fascias/